Le phénomène n’est certes pas nouveau, mais il prend une ampleur qui peut en inquiéter certains. De plus en plus d’étudiants français partent étudier à l’étranger, et notamment en Espagne, pour pouvoir devenir kiné libéral en France.
L’Espagne, un autre centre de formation pour devenir masseur-kinésithérapeute en France ?
En réformant le premier cycle des études de santé, qui conduisit à la suppression de la Première année commune aux études de Santé (PACES), le gouvernement ambitionnait de faciliter la formation des étudiants et d’élargir les profils des futurs médecins, kinés et autres infirmiers. Pourtant, la réalité est toute autre, et de nombreux candidats et candidates au métier de kiné libéral décident de se former à l’étranger pour échapper à un système jugé comme « hypocrite ». La réforme conduirait de nombreux étudiants à quitter la France pour obtenir leur diplôme de kinésithérapie dans d’autres contrées d’Europe, parmi lesquelles l’Espagne apparaît être un véritable eldorado.
Étudiante en première année de kinésithérapie à l’université Camilo José Cela, une université privée à Villanueva de la Cañada, Valentine Llobel explique ses propres motivations : « L’an dernier, en France, en Pass, je m’étais donnée corps et âme pour avoir le concours de médecine, et j’y ai perdu toute confiance en moi. Ici, les études sont dures, mais si je les rate ce sera ma faute, ça ne dépendra pas du niveau des autres… »
Le phénomène n’est pas rare, puisque selon les chiffres officiels, pour la seule année 2021-2022, l’Espagne aurait accueilli plus de 11.400 étudiants français hors programme Erasmus et Master. La grande majorité de ces étudiants (8800) dans des filières médicales et paramédicales n’auraient d’autres choix que de se tourner vers des universités privées espagnoles. Devenir kiné libéral en France en étudiant en Espagne serait donc en train de rentrer dans les mœurs, puisque ces inscriptions en facs privées espagnoles auraient bondi de 27 % en 3 ans.
Le parcours semé d’embûches des futurs kinés libéraux formés en Espagne
Ce phénomène ne concerne pas que les masseurs-kinésithérapeutes mais impacte aussi les professions d’infirmier ou de chirurgien-dentiste (Pour ces derniers, 45 % des nouvelles inscriptions au tableau de l’Ordre concernent des étudiants diplômés hors de France). En revanche, tous dénoncent cette situation, qui est en contradiction totale avec les objectifs poursuivis par le gouvernement. En effet, partir étudier en Espagne plutôt que dans un Institut de Formation en Masso-kinésithérapie (IFMK) en France a un coût, rendant la « sélection économique » encore plus créatrice d’inégalités. Sélectionnés sur dossier et devant réussir un test (sommaire) en Espagnol, les étudiants français doivent ainsi débourser entre 9.000 et 14.000 € par an pour une année de scolarité dans une université privée. Des frais de scolarité, auxquels s’ajoutent les dépenses contraintes de ces étudiants expatriés (logement, déplacement, vie quotidienne, …). Une grande majorité des futurs diplômés retourne exercer en France, puisque pour s’installer en tant que kiné libéral dan s l’Hexagone, quelques formalités suffisent pour faire valider les diplômes obtenus dans l’Union européenne. Mais cela pose néanmoins question d’autant plus que l’Espagne entend conforter cette attractivité. Ainsi, l’université européenne de Madrid (UEM), la plus grande université privée du pays, a créé en 2015 dans sa filière de kinésithérapie une filière exclusivement en Français. En 2022, l’UEM recevait 370 candidatures d’étudiants français pour 128 places, faisant apparaître les débuts d’une sélectivité accrue, semblable à celle que les étudiants avaient fui en franchissant les Pyrénées.
Cette question de la formation des kinés libéraux de demain devra être posée, et des réponses du gouvernement français devront être apportées. Il ne reste plus qu’à attendre pour en connaître le détail…
Et vous, considérez-vous que ces formations suivies à l’étranger posent problème au système de santé français ? Lesquels ? Comment pourrait-on rendre la situation plus apaisée et moins inégalitaire ?
Soyez le premier à laisser un commentaire sur « L’Espagne, une alternative aux IFMK de métropole ? »